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Plan national Sangliers Borloo ajuste le tir

Le ministre de l'Ecologie va donner des instructions aux préfets pour enrayer le développement de la bête noire.

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Le plan national de maîtrise du sanglier, annoncé en mars dernier par Jean-Louis Borloo lors de l'assemblée générale de la Fédération nationale de chasseurs, est prêt. Le dispositif, qui doit entrer en application dès cet été, marque la volonté des pouvoirs publics de s'attaquer à un problème d'envergure nationale.

D'ores et déjà, les préfets ont reçu de la part du ministre de l'Ecologie des instructions pour organiser dans leur département les premières réunions avec les acteurs concernés.

Trois motifs ont poussé le ministre à réagir: la grogne montante des agriculteurs excédés de voir leurs champs et prairies dévastés, l'importance des collisions entre les véhicules et le gros gibier qui prend une dimension inquiétante, et les intrusions de la bête noire en milieu urbain dont les médias se font de plus en plus souvent l'écho.

Chaque année, les chasseurs paient aux agriculteurs près de 20 millions d'euros pour les dégâts commis par le «sus crofa». Des dégâts très localisés puisque 10% des territoires concentrent les trois quarts de la note, mais ils ont tendance à se généraliser.

Plusieurs phénomènes contribuent à ce sureffectif:

- une pratique restrictive de la chasse née dans les périodes de pénurie et qui reste ancrée dans le comportement des chasseurs (consignes de tir pour épargner les reproducteurs, les plus jeunes animaux, les plus gros, jours de non-chasse...)

- un agrainage qui tend à se confondre avec le nourrissage

- l'activité des «chasses commerciales ou de prestige» qui entretient à grands frais des surpopulations de sangliers, au mépris de toute logique cynégétique

- le développement de zones non chassées (friches, milieux fermés, zones naturelles ou réservées) où le sanglier peut proliférer en toute quiétude.

Fiches thématiques

Le plan ministériel propose un cadre national d'actions concrètes à mettre en oeuvre au niveau départemental autour d'une douzaine de thèmes. Il s'agit d'inciter les préfets à puiser dans l'arsenal juridique existant pour résorber les «points noirs».

Le dispositif doit en effet s'exécuter à droit constant; il ne réclame aucune modification législative ou réglementaire. Le principe est d'identifier les situations à problème et de trouver les moyens les mieux adaptés pour y remédier.

Le ministère recommande de dresser, dans chaque département, un état des lieux de la situation du sanglier, une sorte d'audit cynégétique: connaissance des populations, zonage des risques, diagnostic des points noirs.

L'action des fédérations de chasse sera étudiée de près: modalités de gestion, niveaux des dégâts, prélèvements. Une fiche est spécialement consacrée à l'agrainage. Les chasseurs étant au coeur du dispositif, le plan propose de rendre la chasse au sanglier plus efficace en modifiant les pratiques qui épargnent les reproducteurs, distinguent les classes d'âge...

Les actions dans les espaces non chassés, ou insuffisamment chassés (réserves naturelles, réserves de chasse, terrains militaires...) sont également préconisées pour déloger les sangliers de leur refuge.

«C'est une chance pour les fédérations de chasse, qui disposeront désormais de moyens de pression face aux sociétés de chasse qui ne jouent pas le jeu. Avec l'aide des préfets, elles pourront intervenir dans les secteurs à trop forte densité», commente Benoît Guibert, de la Fédération nationale des chasseurs.

Pourtant, selon lui, le compte n'y est pas tout à fait: «Certaines solutions comme l'élargissement des périodes de chasse ou la possibilité d'intervenir dans des zones non chassées ont été écartées parce qu'elles nécessitaient une modification des textes. Il reste le problème des sangliers en zone périurbaine. Il nous faut trouver des méthodes originales de chasse», précise-t-il.

De son côté, Bertrand Saget, éleveur et chasseur dans le Maine-et-Loire, chargé du dossier sanglier à la FNSEA, approuve le plan: «Nous étions demandeurs. La situation n'était plus tolérable. Il faut absolument faire baisser les populations pour protéger nos exploitations. La chasse est un loisir, l'économie des exploitations doit primer. Les préfets disposent d'une boîte à outils. A eux d'y puiser ce dont ils ont besoin. Il est primordial que chacun joue son rôle: DDA, chasseurs, lieutenants de louveterie, gardes de l'Office de la chasse. Dans les grands domaines insuffisamment chassés, des dispositions pourront être prises pour réguler les sangliers en surnombre. Nous serons vigilants sur la bonne application du plan dans le cadre du comité de suivi», assure-t-il.

 

L'agrainage: une arme à double tranchant

Pratiqué avec discernement, l'agrainage est une technique éprouvée de prévention des dégâts agricoles. Elle permet de cantonner les sangliers en forêt pendant la période où les cultures sont particulièrement appétentes.

Mais le procédé est aujourd'hui perverti: l'agrainage se transforme de plus en plus en nourrissage intensif des animaux. A tel point que cette pratique, en améliorant les portées de marcassins et leur survie, est tenue pour être une des principales causes de l'accroissement des populations de sangliers

L'une des actions centrales du plan national (fiche n° 4) est justement de définir et d'encadrer cette pratique. L'agrainage de dissuasion est défini comme «une technique de prévention des dégâts agricoles efficace sous certaines conditions. La nourriture distribuée, par épandage linéaire ou diffus plutôt qu'en point fixe, vise à nourrir les sangliers en forêt pour éviter qu'ils ne dégradent les cultures agricoles pendant la période où elles sont sensibles. Il est efficace pour réduire les dégâts sur semis de maïs, sur céréales à paille jusqu'à la récolte, sur vignes jusqu'aux vendanges, mais ne protège pas les maïs en lait et en maturation. Il est peu efficace sur les prairies».

La fiche propose d'autoriser, voire d'organiser l'agrainage dissuasif pendant les périodes de sensibilité des cultures et d'interdire tout apport de nourriture artificielle qui participerait à l'entretien de fortes densités de sangliers ou à l'accroissement des populations.

 

 

Risques de collisions accrus

Les collisions entre véhicules et gros gibier se sont multipliées au cours des dernières années. En 2008, plus de 42.000 sinistres ont été déclarés, dont près de la moitié (16.797) est imputable au sanglier. C'est ce que révèle le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO), organisme qui indemnise, depuis 2003, les dégâts causés par les collisions avec la faune sauvage.

Pour 2008, le montant des indemnités versées s'est élevé à 21 millions d'euros. Ces accidents de la circulation sont principalement concentrés dans les massifs forestiers des Landes, d'Alsace, de Lorraine, de Seine-et-Marne et de Sologne. Les trois départements les plus concernés sont la Gironde, avec 1.403 collisions, la Moselle (1.314) et le Bas-Rhin (1.296).

 

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